Bangui, le 03 janv.-24
Dans un pays comme la République centrafricaine qui sort progressivement de la spirale des crises militaro politiques, la justice constitue un socle pour instaurer la paix. A cet effet les acteurs de la justice et particulièrement les Juges doivent faire preuve de probité, d’intégrité et de professionnalisme pour ne pas noircir le tableau de Dame Justice.
Depuis des années, des maux minent l’appareil judiciaire centrafricain comme la corruption, la concussion, la prise d’intérêt qui s’exercent à travers le marchandage des procédures avec soit les parties au procès, soit avec les avocats constitués ou encore avec les parents des mises en cause.
Jadis, la justice était une référence mondialement reconnue avec le procès de l’ex empereur Bokassa 1er, monarque et dictateur qui avait fait asseoir son règne par la terreur. De même, le procès des auteurs du coup d’état manqué du 28 mai 2001, dont l’accusé Jean-Jacques Demafouth, Ministre de la Défense Nationale et haut dignitaire du régime au pouvoir s’en est tiré par un acquittement, en est une autre illustration de sa notoriété.
Si aujourd’hui, sous le magistère du Président Faustin Archange Touadera, des efforts considérables sont fait pour redorer le blason de la justice avec de nombreux chantiers qui ont été lancés, la corruption empeste toujours la famille judiciaire. Les magistrats, les greffiers, les avocats et les huissiers de justice voire les acteurs de la chaîne pénale baignent dans ce mal social.
Fort de ce constat qui noircit de plus en plus l’appareil judiciaire et lui jette des opprobres, le Président Faustin Archange Touadera, Premier Magistrat centrafricain et Président du Conseil Supérieur de la Magistrature, vient d’enfourcher les grands chevaux pour aller combattre ce fléau qui fait tanguer Dame Justice.
Dans son traditionnel message à la nation à l’occasion du nouvel an, le Chef de l’Etat est revenu sur la mise en garde qu’il avait faite aux magistrats relative « au sens de responsabilité et de dignité des hauts Magistrats afin qu’il soit mis fin aux pressions souvent motivées par des considérations étrangères à la justice, exercées sur les plus jeunes afin de les contraindre à violer la loi ».
En effet, il existe bel et bien une relation hiérarchique au sein de la magistrature qui fait que les jeunes magistrats sont tenus à l’obéissance, sur tous les plans aux plus anciens et hauts gradés qu’ils appellent respectueusement nos « patrons ». Cette relation qui frise la domination hiérarchique empêchant ainsi les jeunes juges à traiter des dossiers de procédures et à rendre les décisions judiciaires en toute indépendance en se référant qu’à leur intime conviction, sont obligés de se soumettre aux orientations données par leurs « patrons ».
C’est justement à ce niveau que le marchandage des procédures s’active. Les parties au procès ou leurs conseils se réfèrent à un haut magistrat pour faire pression sur un jeune juge de traiter un dossier selon les orientations données afin de favoriser l’une des parties au procès moyennant des contreparties.
Souvent, ces jeunes magistrats n’ont pas d’objection à faire de peur d’être mal vu par leurs chefs qui sont solidaires entre eux et capables de leurs causer des entraves dans leur vie professionnelle.
Le Président Faustin Archange Touadera a révélé au grand jour ce qui se pense et se dit tout bas dans les couloirs des tribunaux et de palais de justice. « Investi par la Constitution de la noble mission de garantir l’indépendance du pouvoir judiciaire, je veillerai personnellement à cela, car sans une justice indépendante, il n’y a pas de paix, de stabilité et de développement » a promis Professeur Faustin Archange Touadera. Pour y arriver, il faut prendre les taureaux par les cornes en sanctionnant ceux qui violent la loi et mettre à la retraite les magistrats qui ont fait leur temps. Il est vrai que l’effectif de nos magistrats n’a pas encore atteint le niveau requis et qu’il n’est pas encore temps pour mettre certains hors jeu. Mais le prix en vaut la chandelle et on ne peut pas faire une omelette sans casser des œufs.
Evidemment, les acteurs judiciaires doivent prendre conscience de leur rôle en tant que régulateur de la vie en société.
Le peuple, au nom duquel la justice est rendue, se félicite des actions menées dans le cadre de la lutte contre l’impunité avec l’organisation régulière des sessions criminelles pour donner à chacun ce qu’il mérite, tous ceux qui se sont mis au travers de la loi par les faits des crimes. Toutefois, engager des poursuites contre les auteurs des crimes économiques et financiers seraient le couronnement des efforts consentis pour une justice libre et indépendante.
Une justice qui doit favoriser le climat des affaires afin de donner la possibilité aux investisseurs de participer à la croissance économique de la République centrafricaine.
Le Président Faustin Archange Touadera l’a clairement exprimé : « Je reste déterminé à œuvrer pour l’indépendance réelle de la justice, l’accès de tous les Centrafricains à la justice et l’amélioration des conditions de travail des acteurs judiciaires, afin de renouer la confiance entre la justice et les justiciables et la faire participer efficacement à l’amélioration du climat des affaires, un élément clé de la croissance et du développement de notre pays ».
La volonté politique est affichée au plus haut sommet de l’Etat et doit être traduite en acte par l’Exécutif notamment par un Gouvernement d’action dynamique. D’autres chantiers ont été annoncés notamment l’augmentation de l’effectif des acteurs judiciaires et la création des tribunaux de grande instance dans neuf localités du pays.
@Hervé Binah