LA RCA N’A PAS D’AUTRES CHOIX QUE DE SE PAYER LE LUXE D’UNE NOUVELLE DESTINEE

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Bangui, le 17 aout 23

Après une crise, dernière-née d’une série, symptomatique des pays effondrés: un État failli. Celle-ci, débutée en décembre 2012, a vu débarquer une multitude d’acteurs en Centrafrique. Tous sont venus croyant détenir la solution et faisant fi des réalités locales et des interactions endogènes; peut-être faute d’un leadership national ou encore de manque de résilience du peuple centrafricain? Entre les acteurs extérieurs, au niveau régional, les Nations Unies, l’Union européenne et l’Union africaine bref, ils sont nombreux au chevet de la RCA. Chacun a sa propre lecture de la situation et sa solution face à la crise.

Inéluctablement, la crise ne peut que se complexifier avec le nombre élevé des acteurs et autant de voies. L’accord de Khartoum concoure à cette assertion… Cette crise née d’une rébellion armée hétéroclite, menée par la coalition Seleka, truffée d’éléments criminels étrangers et appuyée par certains pays de la région, a fini par la prise du pouvoir.

Incapable de gérer les affaires de l’Etat, cette coalition a dû abandonner le pouvoir toujours sous l’influence des acteurs extérieurs. S’en est suivi une transition expéditive. Une transition à la hussarde. Celle-ci s’est révélée incapable de mobiliser les nouveaux acteurs pour se réinventer et proposer une politique de développement national. Manquant de temps et n’ayant aucune expertise sur les enjeux et les attentes du pays, cette transition s’est vite retrouvée sous pression. Le pays était tiraillé entre, d’un côté, la communauté internationale qui réclamait des élections à tout prix avec une grande partie du pays entre les mains des groupes armés ; de l’autre côté, une population abusée, “violée” et vivant dans l’extrême pauvreté et de surcroit victime perpétuelle des groupes rebelles-terroristes.

Entre les vœux de la communauté internationale qui correspondent à leur calendrier et ceux de la population, les premiers ont pris le dessus parce que l’exigence des élections s’accompagnait des promesses mirobolantes d’aides financières et surtout d’une promesse erronée de désarmement même forcé. Les élections de 2015 vont se tenir dans un pays où les groupes armés vont conserver les armes et surtout garder leur hégémonie et autonomie illégale sur les régions militairement occupées.

Nous sommes à la moitié de l’année 2020. À quelques mois des élections de décembre, le même scénario risque de se répéter : les groupes armés contrôlent la quasi-totalité du pays (80% du territoire). Ils conservent armes et influence locale. Le pays est tiraillé, entre d’un côté, la communauté internationale qui réclame des élections à tout prix avec une grande partie du pays entre les mains des groupes armés ; de l’autre côté, une population abusée, “violée” et vivant dans l’extrême pauvreté et de surcroit victime perpétuelle des groupes rebelles-terroristes.

Le seul changement substantiel de l’accord de Khartoum qui mérite remarque et incompréhension, concerne les groupes armés. Pour s’en convaincre, une simple et rapide lecture des termes de cet Accord révèle la part belle faite à ces terroristes en dépit de leurs nombreuses exactions sur la population civile. A ce jour, l’accord peine à mettre un terme aux exactions sur le terrain n’eût été l’offensive des FACA et leurs alliés russes et rwandais.

L’étude de l’archéologie des pratiques politiques en RCA révèle la part belle faite aux acteurs extérieurs croyant à certains dogmes sans éprouver les réalités et attentes locales. Déjà en 2005, 2011 et 2015, les élections en RCA font suite à ce qu’il faut considérer d’injonction de l’extérieur peut-être une fois de plus faute d’un leadership national ou de résilience du peuple. Pis, celles de 2015 où le Tchad et la France ont accordé leurs violons pour faire imposer leur projet: «Nous avons avec le président François Hollande la même position en ce qui concerne la RCA: cette transition doit s’arrêter. Mieux vaut une mauvaise élection qu’une transition chancelante.»

La RCA est un Etat indépendant et membre à part entière des Nations-Unies. A ce titre, elle doit disposer de son destin. Et cela passe par la réappropriation de son destin par l’introspection pour exhumer les causes de sa stagnation par l’analyse des facteurs endogènes et exogènes.

@François DALINGOMBE

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