Evariste Ngamana rassure que la situation en Russie n’entame en rien les relations avec la RCA

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Pour la première fois, la Centrafrique réagit aux événements de samedi dernier en Russie. Les autorités centrafricaines espèrent que « tout va rentrer dans l’ordre et [que] les liens de coopération entre Moscou et Bangui vont demeurer comme à l’accoutumée ». Mais elles ajoutent que si les Français et les Américains veulent venir aussi sécuriser le territoire centrafricain, « ils seront les bienvenus ». Évariste Ngamana est le premier vice-président de l’Assemblée nationale centrafricaine. Il est aussi le directeur de campagne pour le « oui » au référendum du 30 juillet prochain. En ligne de Bangui, il répond aux questions de Christophe Boisbouvier.

RFI : Pourquoi voulez-vous changer de Constitution ?

Évariste Ngamana : Vous savez que c’est le peuple centrafricain dans son ensemble qui a fortement milité pour le changement de cette Constitution, étant entendu que la Constitution du 30 mars 2016 renfermait beaucoup de manquements et que c’était une Constitution qui avait été adoptée après la période de transition. C’est ainsi que vous avez vu, dans un passé récent, il y a eu des marches, des manifestations, des mémorandums, des pétitions qui ont été destinées aux autorités centrafricaines, demandant, effectivement, le changement de cette Constitution, la prise en compte des résolutions issues du dialogue républicain qui s’est tenu à Bangui en mars 2022.

Pour l’opposition politique, en fait, tout est simple, le président Faustin-Archange Touadéra veut changer la Constitution pour pouvoir briguer un troisième mandat en 2025…

C’est faux et archi-faux. Pour nous, ce qui compte aujourd’hui, c’est la réécriture de cette nouvelle Constitution. Les autres débats ne sont que du dilatoire.

Mais, de fait, si cette nouvelle Constitution est adoptée, Faustin-Archange Touadéra pourra éventuellement se représenter en 2025, c’est ça ?

Une nouvelle Constitution revient à dire que c’est une nouvelle République, et si le président de la République répond aux critères d’éligibilité, pourquoi pas, c’est un Centrafricain comme tout autre et c’est le peuple centrafricain qui tranchera à travers les urnes.

Donc les compteurs vont bien être remis à zéro ?

Le compteur sera remis à zéro, puisqu’il s’agit d’une nouvelle République, et d’un nouveau départ.

Et dans ce cas-là, est-ce que le président Touadéra sera le candidat naturel du parti au pouvoir, le mouvement Cœurs unis (MCU), pour la prochaine présidentielle de 2025 ?

Il est prématuré de vous dire un mot sur cette question, puisque au moment venu, c’est le MCU qui va se réunir en congrès pour décider s’il sera candidat ou pas. Donc pour l’instant, je ne peux pas vous dire si c’est Touadéra, si c’est Boisbouvier, si c’est Ngamana, mais le moment venu, vous le saurez.

Pour l’organisation de ce référendum, vous comptez notamment sur le soutien du Rwanda et de la Russie, mais quand on parle des Russes, est-ce qu’on pense à ceux du groupe paramilitaire Wagner, ou à ceux de l’État russe ?

Mais pourquoi vous ne parlez que de la Russie et du Rwanda ? On pourra aussi compter sur la France, les États-Unis, la Chine, etc. Mais en ce qui concerne la question du mécontentement en Russie, c’est un problème purement intérieur à la Russie. Notre relation avec la Russie, c’est une relation d’État à État et nous ne pouvons que nous conformer à cela.

Et quand vous avez vu samedi dernier les images d’Evguéni Prigojine qui entrait en rébellion contre Vladimir Poutine, comment avez-vous réagi ?

C’est un problème purement « russo-russien », donc c’est entre les Russes, cela n’entame en rien les relations qui ont toujours existé entre nos deux États. Donc nous osons espérer que tout va rentrer dans l’ordre et que nos liens de coopération vont demeurer comme à l’accoutumée.

Mais concrètement, Évariste Ngamana, les deux chefs du groupe paramilitaire Wagner qui sont dans votre pays, côté militaire, l’ancien légionnaire français Vitali Perfilev, et côté politique, Dmitri Sytyi, est-ce qu’ils vont rester à Bangui ou pas ?

Je n’en sais rien, puisque je ne connais pas leur fonctionnement. Vous savez, les hommes passent mais les institutions demeurent, donc ce qui compte pour nous, c’est la relation d’État à État qui ne date pas d’aujourd’hui entre la République centrafricaine et la fédération de Russie.

Alors vous dites que tous les pays amis sont bienvenus pour aider à l’organisation du référendum du 30 juillet prochain, et vous citez la France parmi ces pays. Voulez-vous dire que la France reste pour vous un pays ami ?

Mais pourquoi pas ! On a un lien séculaire, historique, culturel avec la France, même économique. Si la France veut venir nous prêter main forte, elle est la bienvenue. Je pense qu’on n’a pas de problèmes avec la France.

Est-ce qu’aujourd’hui, après ce qu’il s’est passé samedi dernier en Russie, vous avez intérêt à maintenir cette alliance militaire privilégiée avec la Russie, ou est-ce que vous avez intérêt à diversifier vos alliances militaires avec d’autres pays, pourquoi pas les États-Unis, pourquoi pas la France ?

Tout le monde est bienvenu en République centrafricaine. Donc aujourd’hui, si d’autres États se manifestent pour venir nous prêter main forte, de manière sincère et de manière durable, nous, nous sommes disposés et disponibles pour les accueillir, ils sont les bienvenus.

Oui, mais vous savez bien que les Américains et les Russes ne vont pas cohabiter sur votre territoire et que, lors du sommet États-Unis Afrique de Washington de décembre dernier, le président Biden a proposé un plan de sécurisation au président Touadéra, à condition que les Russes quittent la République centrafricaine…

Ça, c’est vous qui le dites, mais nous avons des exemples sur le continent africain où ces deux États coopèrent et collaborent. Et je pense que le gouvernement centrafricain a travaillé sur le dossier, ça a déjà été transmis au niveau des États-Unis, donc nous attendons la suite. La République centrafricaine ne ferme pas la porte à qui que ce soit.

Donc, vous n’avez pas fermé la porte à la proposition Biden, vous avez répondu à la proposition américaine ?

Évidemment, puisqu’ils voudraient nous aider, est-ce qu’on doit dire non ? Et si la France veut nous aider, on ne dira pas non.

Source :Christophe Boisbouvier de RFI

 

 

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