Centrafrique : La contestation de la légitimité du Président Faustin Archange TOUADÉRA par les leaders de l’opposition démocratique centrafricaine est-elle juridiquement et politiquement assez justifiée ?

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Bangui, le 25 janv. 21

Alexis N’DUI-YABELA,
Maître de conférences à l’Université de Bangui.

Retour sur l’interprétation erronée, voire démagogique de la notion du « suffrage universel direct » par certains candidats et non candidats à l’élection présidentielle du 27 décembre 2020. En Centrafrique, la politique n’est pas un dîner de gala mais une source d’enrichissement des poches des leaders des partis politiques. C’est ainsi  qu’à l’aube des derniers scrutins, les opposants démocratiques du jour ont crié au bandit. Or, selon les sources dignes de foi, ils sont les auteurs de ce qui se passe de nos jours. Voici une lecture d’un Me de  Conférence de l’Université de Bangui.

Alexis N’DUI-YABELA,

Maître de conférences à l’Université de Bangui,

Coordonnateur du CSU chargé de Réflexions, Initiatives et Propositions.

Devant une foule immense rassemblée au Stade 20 000 Places de Bangui dans le cadre d’une campagne d’évangélisation animée par un prédicateur camerounais, ce professionnel de Dieu avait lancé, à l’image du « Quousque tandem abuteris, Catitila, nostra patientia » de Cicéron dans la phrase d’ouverture de sa Première Catilinaire, cette apostrophe : « Jésus est arrivé parmi les siens et les siens l’ont rejeté ». Devant reprendre ce passage évangélique en sango (l’une des deux langues officielles des Centrafricains) pour sa meilleure compréhension par une partie du peuple de Dieu rassemblé au Stade 20 000 Places, l’interprète du prédicateur camerounais, un Centrafricain de souche, a déformé, dénaturé ou travesti le message évangélique en ces termes : « Na Jésus a si na popo ti a mbo, na a mbo a toumbalo ! » Ce qui se traduit littéralement et respectivement dans la langue de Shakespeare et dans celle de Molière ainsi qu’il suit : « Jésus arrived amongs the dogs and the dogs rejected him» ; « Jésus est arrivé parmi les chiens et les chiens l’ont rejeté ». En gbaya, un dialecte des habitants du Sud-Ouest de la République centrafricaine (RCA), la dénaturation de la pensée du Pasteur camerounais se traduit de la manière suivante : « Jésus hoa ha soko iho tolo, iho tolo yino wènè ! ». Sans avoir la prétention de faire entendre dans toutes les langues, à l’image des croyants de Galilée le jour de la Pentecôte[1], l’interprétation grossièrement erronée d’un passage biblique par l’interprète du prédicateur camerounais, force est en tout cas de relever que l’interprétation de la notion du « suffrage universel direct » par certains candidats et non candidats à l’élection présidentielle du 27 décembre 2020 s’apparente incontestablement à celle de notre célèbre interprète du prédicateur camerounais. Pour parler comme un fabuliste du XVIIe siècle français, c’est ce que « Nous l’allons montrer tout à l’heure[2] ».

En effet, après avoir énuméré dans son communiqué un certain nombre de localités où les élections du 27 décembre 2020 n’ont pu se dérouler pour des raisons d’ordre sécuritaire, le Président du Mouvement pour la libération du peuple centrafricain (MLPC) en est arrivé à une interprétation suivante de la notion du suffrage universel : « Le droit de vote étant un droit constitutionnel reconnu à tout centrafricain en âge de voter et jouissant de ses droits civiques, son exercice n’a pas été respecté dans son universalité sur le territoire national[3]. (C’est nous qui avons souligné et mis en gras ce groupe de mots) » Dans une autre déclaration[4], le président du MLPC persiste et signe : « Le caractère universel des élections, pourtant consacré par la Constitution, n’a pas été respecté, privant de fait les ¾ des électeurs de l’exercice de leur droit de vote ».

Naviguant dans la même direction, un « Juriste, Administrateur des élections » a totalement sombrer dans ce que les compatriotes Frédéric AKOBENDE et Mesmin MADIDE-ALADILA[5] qualifient d’interprétation « tendancieuse et malencontreuse des charlatans politiciens ». En effet, le « Juriste, Administrateur des élections » estime pour sa part que la situation décrite par le président du MLPC« entache la représentativité et la légitimité du pouvoir car l’article 35 de la constitution confirmé par l’article 68 de la constitution du 30 mars 2016 impose que le président de la république ainsi que les députés soient élus au suffrage universel direct c’est à dire sur l’ensemble du territoire national. (C’est nous qui avons souligné et en gras cette interprétation du suffrage universel) »[6] Au passage, convient-il de le signaler, le mot  « république » rédigé en « r » minuscule n’est nullement une faute de saisie imputable à l’auteur de ces lignes, mais résulte essentiellement d’un copier-coller du texte même de notre « Juriste, Administrateur des élections ». Dans la mesure où le dictionnaire Larousse Compact Plus fait remarquer que « […] le mot ‘’République’’ s’écrit avec une majuscule quand il entre dans la dénomination officielle d’un État […] »[7], comment un Centrafricain digne de ce nom peut-il se permettre d’écrire « Président de la république » en minuscule ? Comme quoi, certains compatriotes n’ont vraiment pas du respect pour notre très chère « République » créée par Barthélémy BOGANDA.

Par mesure de précaution, d’autres  commentateurs de l’actualité politique centrafricaine ont laissé de côté la notion du suffrage universel pour recourir au concept de légitimité rarement évoqué par la doctrine[8]. Il en va ainsi pour le compatriote Valence DOUDANE qui, dans sa chronique[9], soutient cette argumentation : « le vote doit être une source de légitimité démocratique, mais lorsque, comme dans le cas des élections qui viennent de se dérouler en Centrafrique, plusieurs provinces n’ont pu voter, il y a un manque incontestable de légitimité (C’est nous qui avons souligné et mis en gras cette contestation de la légitimité du Président Faustin Archange TOUADÉRA) ». Quant aux principaux leaders de la Coalition de l’opposition démocratique (COD-2020), ceux-ci ont déclaré, à l’issue d’une réunion extraordinaire de la Conférence des Présidents tenue le 19 janvier 2021, que « les élections groupées du 27 décembre 2020 ne sont qu’une mascarade et ne reflètent nullement l’expression de la volonté du peuple centrafricain ». Par conséquent, les leaders du COD-2020 ont, à l’unanimité, décidé de ne pas reconnaitre la réélection du Président Faustin Archange TOUADÉRA au motif que « la grande majorité des centrafricains inscrits sur la liste électorale, soit 65% n’a pas participé au vote (C’est nous qui avons souligné et mis en gras l’interprétation du suffrage universel par les leaders du COD-2020 »[10]. A signaler une fois de plus que le mot « centrafricains » écrit en « c » minuscule n’est pas une faute de saisie imputable à l’auteur de ces lignes. Ce dernier ne s’est contenté que de faire un copier-coller du premier tiret de la déclaration du COD-2020 pour permettre de montrer à quel point les leaders du COD-2020, contrairement aux membres[11] du G5+, s’en fichent complètement ou, pour reprendre une meilleure expression de certains compatriotes, n’ont « le moindre respect du peuple centrafricain[12] ».

Et pourtant, dans leur déclaration préliminaire, publiée immédiatement à l’issue du premier tour des élections groupées du 27 décembre 2020, les observateurs internationaux ont été tous unanimes pour déclarer ce premier tour de scrutin non seulement « Libre et démocratique »[13], mais surtout « conforme »[14] à la fois au droit positif centrafricain et aux standards internationaux. Entre les commentateurs de l’actualité politique centrafricaine et les observateurs internationaux qui devait avoir tort ou raison ? Dans sa décision rendue en le jour de la commémoration des martyrs du 18 janvier 1979, la Cour constitutionnelle, pour paraphraser le Professeur Jacques ROBERT, a non seulement « dit le droit », mais « rendu à chacun son dû »[15]. Le nec plus ultra, c’est que les plus hauts juges ont apporté des clarifications magistrales sur certaines notions du droit constitutionnel utilisées « à tort et à travers »[16] non seulement par des non initiés à cette « branche fondamentale du droit public[17] », mais aussi par des juristes privatistes qui dans leur cursus universitaire n’ont nullement étudié d’une manière approfondie le droit politique.

Se fondant en effet sur la notion du suffrage universel, une brochette de candidats[18] et non candidats[19] à l’élection présidentielle du 27 décembre 2020 avaient demandé aux membres de la Cour constitutionnelle de bien vouloir l’annuler purement et simplement pour défaut de légitimité ou de représentativité. Dans leur décision du 18 janvier 2021, les juges constitutionnels ont sévèrement sanctionné, pour ne pas dire recadré, l’interprétation aussi  bien erronée que démagogique de la notion du suffrage universel par les requérants et leurs Conseils. Pour expliciter davantage le verdict de la Cour constitutionnelle, la question de fond qu’un des rares constitutionnalistes du Berceau des Bantous aurait aimé partager avec les Conseils des candidats malheureux à l’élection présidentielle du 27 décembre est la suivante : juridiquement et politiquement parlant, la notion de « suffrage universel direct », telle que visée aux articles 26 alinéa 3 et  35 de la loi fondamentale de notre pays, signifie-t-elle « élection inclusive », élection sur « l’ensemble du territoire national », élection avec « la grande majorité des Centrafricains », « taux élevé de participation au processus électoral[20] » ou élargissement du droit de vote aux réfugiés[21] comme cela avait été imposé par la communauté internationale lors des élections groupées de 2015 ?

A s’en tenir à une « interprétation génétique[22] » qu’un ancien président de la IIIe République française (un homme politique par excellence) donne de la notion du suffrage universel, interprétation rapportée par un Professeur émérite de science politique, à la suite des sages de la Cour constitutionnelle, tout constitutionnaliste ne peut répondre à la question soulevée ci-dessus que par la négative. En effet, d’après l’esprit de la Constitution, affirmait l’ancien président de la République française, notamment Adolphe THIERS[23] (1797-1877), « Universel ne veut pas dire tous, mais le plus grand nombre possible »[24]. Quelques années plus tard, le Professeur Joseph Barthélémy reprécisera, explicitera et affinera l’interprétation génétique du Président THIERS dans son Traité de droit constitutionnel  en ces termes : « L’universalité du suffrage ne doit pas être entendue avec son sens rigoureusement grammatical ; elle signifie seulement que l’octroi de l’électorat n’est soumis à aucune condition de naissance, de fortune ou de capacité. Mais il peut être et est, en fait, subordonné à d’autres conditions : âge, sexe, moralité, dévouement à la chose publique[25], etc. » Plus récemment, et ce dans une analyse[26], ô combien pénétrante,, Monsieur Bruno DAUGERON, Professeur de droit public à l’Université de Lyon, a emboité le pas à ses devanciers pour réitérer la même interprétation de la notion du suffrage universel. De l’économie générale des analyses de cet éminent constitutionnaliste de notre siècle (le XXIe siècle), il ressort que « Le peuple souverain, défini depuis le droit constitutionnel révolutionnaire comme « l’universalité des citoyens » dans les Constitutions de l’an I[27], l’an III[28] et de 1848[29], n’en est pas pour autant l’universalité des électeurs, tous les citoyens […] »[30]

Au regard des interprétations authentiques de la notion du suffrage universel rapportées par la doctrine, il résulte de la toute première décision[31] du nouveau président de l’Autorité nationale des élections (ANE) qu’à l’issue du premier tour des élections groupées du 27 décembre 2020 « le plus grand nombre possible » des suffrages valablement exprimés est de 642 956. La même décision du nouveau président de  l’ANE indique que le candidat du Mouvement Cœurs Unis, le Professeur Faustin Archange TOUADÉRA a obtenu 346 687 voix, soit la majorité absolue des suffrages valablement exprimés. Dès lors, à partir du moment où le Professeur Faustin Archange TOUADÉRA a démocratiquement obtenu un « plus grand nombre possible » de voix à l’issue de l’élection présidentielle du 27 décembre 2020, en bon démocrate, devrait-on vraiment se poser des questions  sur la légitimité de son élection ? Un délégué des étudiants inscrits en première année de licence en droit élu par le « plus grand nombre possible » de ses camarades, et ce en l’absence d’un « plus grand nombre possible » d’autres camarades qui n’ont pu participer aux opérations électorales pour quelque motif que ce soit, ce délégué, déjà proclamé élu et dont le procès-verbal de son élection a été acheminé en bonne et due forme aux autorités académiques, est-il vraiment illégitime ?

Dès lors, peut-on véritablement établir une distinction majeure entre « légitimité légale » et « légitimité politique[32] » comme notre très cher Maître Nicolas TIANGAYE a tenté de la faire sur les ondes de la radio Ndèkè Luka ? A notre connaissance et du point des politistes ou politologues, et non de celui des politiciens, la « légitimité légale » fait partie intégrante de la légitimité politique. En effet, selon une célèbre classification ternaire des modes de domination légitime établie par Max WEBER on distingue trois (3) types de domination légitime : la « légitimité légale rationnelle », la « légitimité traditionnelle » et la  « légitimité charismatique »[33]. De ces trois types idéaux de domination légitime, indique une étude récente[34] du sociologue politique Mattei DOGAN, seul le premier conserve une certaine validité. De plus, convient-il de le faire remarquer, la science politique prête davantage attention à la légitimation[35] (et à la délégitimation[36]) qu’à la légitimité. C’est pourquoi Monsieur Jean BAUDOUIN, Professeur de science politique à l’Université de Rennes, affirme que « Légitimité et légitimation vont de pair[37] ». Même si à l’issue de l’élection présidentielle du 27 décembre 2020 « le président TOUADÉRA a été déclaré élu vainqueur avec seulement 17% du corps électoral », comme le font remarquer les leaders du COD-2020, il n’en demeure pas moins vrai que, pour emprunter l’expression du Professeur BAUBOIN, le Président Faustin Archange TOUADÉRA a obtenu une « légitimité élective[38] » (346787 voix sur 642 956 suffrages valablement exprimés).

Très sincèrement et honnêtement parlant, il faudra être un juriste centrafricain spécialiste de droit privé comme mes cadettes ABHO Martinienne D’Elisabeth (Magistrat), PITEAWEI-HEMBELA Patricia (sans emploi) et mon cadet Olivier NAMZOKA (sans emploi), dépourvus de toute connaissance exacte en théorie politique, pour refuser de comprendre que le nouveau président de l’ANE avait provisoirement déclaré élu Président de la République, le Professeur Faustin Archange TOUADÉRA, sur la base du « plus grand nombre possible » des suffrages valablement exprimés le 27 décembre 2020. Après avoir opéré diverses rectification, effectuédes redressements nécessaires et procédé à des annulations[39], la Cour  constitutionnelle, en toute indépendance des juges[40] dont parle le Professeur ROBERT, a proclamé définitivement élu Président de la République, le Professeur Faustin Archange TOUADÉRA, et ce au regard du « plus grand nombre possible » de voix obtenues par ce candidat, à savoir 318 628 voix, soit 53, 16%.

C’est ici le lieu de souligner, au regard de la décision des plus hauts juges, que juridiquement et politiquement, le suffrage universel ne signifie ni « élection inclusive[41] », ni « élection sur l’ensemble du territoire national », ni « la grande majorité des Centrafricains », ni élection avec un « taux de participation élevée »,  ni élargissement du droit de vote aux réfugiés. En ce qui concerne singulièrement les réfugiés, le Professeur Philippe BLACHÈR, l’un des meilleurs internationalistes[42] est catégorique : « les réfugiés sont des personnes qui ne peuvent plus se prévaloir de leur nationalité d’origine (bien souvent en raison des persécutions qu’ils ont subies dans leurs pays) et qui demandent l’asile à un autre État. La convention internationale, dite « Convention de Genève » du 28 juillet 1951 confère à ces personnes des droits égaux à ceux des nationaux dans certains domaines, tels que l’emploi, l’éducation ou la santé.» Ce qui signifie, en d’autres termes, que dans le domaine politique, les réfugiés n’ont aucun droit à faire valoir sur le territoire où il bénéficie du statut de réfugié. Voter étant un acte politique[43] par excellence, écrit Monsieur Jean-Marie DENQUIN, Professeur à l’Université de Paris X Nanterre, le statut des réfugiés ne leur pas d’exercer le droit de vote.  Pour information des leaders du COD-2020, des réfugiés foisonnent ou pullulent dans de nombreux pays occidentaux. La question de fond qui mérite d’être soulevée ici est la suivante : a-t-on imposé à ces pays occidentaux la prise en compte du vote des réfugiés au moment des consultations électorales organisées dans ces pays ? Pourquoi vouloir suivre moutonnement  la communauté internationale qui avait imposé à la RCA ce qui ne se pratique nullement dans les pays occidentaux ?

Ces précisions relatives au droit de vote des réfugiés étant faites, revenons sur la notion du suffrage universel qui nous préoccupe. Ainsi, pour la propre gouverne de certains candidats et non candidats à l’élection présidentielle du 27 décembre 2020 qui en donnent ou continuent d’en donner une interprétation démagogique, la présente étude a essentiellement pour but de leur faire comprendre ce qui suit : loin de s’entendre comme « élection inclusive », « élection sur l’ensemble du territoire national », élection avec « la grande majorité des Centrafricain », élection avec « un taux de participation » vertigineux, ou élection devant inclure nécessairement des compatriotes réfugiés, la notion du « suffrage universel direct » s’oppose, pour sa part, à la vieille pratique historique du suffrage restreint (I). Ayant été consacrée[44] en Europe au courant du XIXe siècle, cette notion a connu et ne cesse de connaître un élargissement progressif (II).

I/ LE SUFFRAGE UNIVERSEL, UNE NOTION QUI S’OPPOSE A LA VIELLE PRATIQUE HISTORIQUE DU SUFFRAGE RESTREINT

Comme le fait remarquer un ancien élève de l’École nationale d’administration de Paris, devenu par la suite journaliste politique, « S’il nous semble aujourd’hui naturel que les élections aient lieu au suffrage universel, sans lequel il ne saurait y avoir de démocratie authentique, cette évidence ne s’est imposée qu’avec le temps[45] ». Pendant longtemps, le suffrage restreint a prévalu. Pour en avoir le cœur net, il suffit d’évoquer ici deux exemples historiques : notamment celui du suffrage restreint dans l’expérience athénienne de la démocratie dans  la Grèce Antique (A) et celui du suffrage censitaire qui prévalait chez les descendants des Gaulois[46] avant l’instauration définitive du suffrage universel en 1848 (B).

  1. Le suffrage restreint dans l’expérience athénienne de la démocratie dans la Grèce Antique

Souvent qualifiée de berceau de la démocratie, la Grèce s’enorgueillit de ce que la démocratie était déjà pratiquée ses cités-États, Athènes notamment, cinq siècles avant notre ère. Toutefois, la démocratie d’alors présentait une forme différente de celle d’aujourd’hui. Tout d’abord, les citoyens grecs participaient plus directement à la gestion de la cité. Tous les citoyens masculins étaient membres d’une assemblée qui se réunissaient au cours de l’année pour discuter des problèmes du moment[47]. C’est par un simple vote à la majorité qu’était arrêté la politique de la cité, ou polis.

Par contre, les femmes, les esclaves, les étrangers (métèques) et les barbares (ceux qui ne parlent pas le grec) ne possédaient aucun droit politique. La démocratie athénienne était donc une forme aristocratique de démocratie en ce qu’elle ne concernait qu’une minorité de privilégiés. Probablement, entre 50 et 80% de la population n’avaient pas voix au chapitre. Comme l’explique le Professeur Dmittri Georges LAVROFF, l’ « Assemblée du peuple (Ecclésia) qui rassemble, en principe, tous les citoyens mais dans la réalité un nombre de trois mille (3000) personnes environs, était investie de larges pouvoirs[48] » dont celui du vote des décrets, expression de la volonté populaire. Seule une minorité de citoyens pouvait voter et les magistrats qui dirigeaient la cité était tirés au sort[49]. Reste que ce mode de gouvernement favorisait la liberté d’expression, puisque tout citoyen autorisé à voter avait le droit de faire connaître son opinion avant que les décisions ne soient prises. Les fonctions politiques n’étaient pas l’apanage d’une élite, mais elles pouvaient être assumées par n’importe quel citoyen masculin. Selon l’historien anglais, D. Heater, « Les Athéniens eux-mêmes étaient fiers de leur démocratie. Ils se jugeaient plus proche ainsi de la plénitude et de la perfection que sous une monarchie ou une aristocratie. »

Comme les illustres membres du COD-2020 ont pu aisément le constater eux-mêmes, sans l’aide des jeunes collègues de l’auteur de ces lignes en charge des travaux dirigés de droit constitutionnel à la Facultés des sciences juridiques et politiques (FSJP) de l’Université de Bangui, l’étude de la démocratie athénienne de l’Antiquité, qualifiée de démocratie directe, montre qu’elle ne concernait pas « la grande majorité » d’Athéniens : car les femmes, les esclaves, les barbares en étaient exclus. En réalité, la démocratie athénienne était réservée à une catégorie de privilégiés qui constituait une véritable oligarchie. Et force est de faire remarquer aux leaders du COD-2020 que dans ces conditions d’exclusion d’un pan important de citoyens d’Athènes, la légitimité des magistrats tirés au sort par environ trois mille (3000) Athéniens seulement n’était nullement remise en cause.

Qu’en est-il cependant de ce mode de gouvernement au XXIe siècle? La démocratie directe est-elle encore pratiquée par certains Etats membres de l’Organisation des Nations unies ? A l’exception de ce qui est encore pratiqué dans quelques villes américaines de la Nouvelle-Angleterre et dans certains cantons suisses[50], pour reprendre Pierre PACTET, Professeur émérite de l’Université Paris XI et Doyen honoraire de la Faculté de droit Jean-Monnet à Sceaux, la pure démocratie (la démocratie directe) n’est qu’une curiosité politique et institutionnelle,  « car elle n’existe nulle part ailleurs au plan étatique[51] ». Il suffit de considérer la taille des pays modernes avec leurs millions d’habitants pour comprendre que ce mode de gouvernement serait techniquement impossible. Cela est d’autant vrai que les 4 000 000 de Centrafricains ne peuvent se rassembler dans l’enceinte du stade 20 000 Places pour une pratique de la démocratie directe. De plus, dans le monde agité qui est le nôtre et combiné au phénomène de pauvreté endémique qui caractérise notre pays, combien de citoyens centrafricains pourraient consacrer des heures et des heures à débattre de questions politiques ? A la démocratie directe d’autrefois a succédé la démocratie représentative[52]. Ce système se caractérise par l’existence d’un corps législatif à une ou deux chambres (monocaméralisme ou bicaméralisme), composé de membres élus par le peuple ou désignés d’une autre manière. Ces députés ont la responsabilité de voter des lois censées concourir au bien du peuple dont ils sont les représentants.

C’est au Moyen Age que la démocratie représentative commença à faire son chemin. Aux XVIIe et XVIIIe siècles, on accorda une plus grande signification à des institutions du XIIIe siècle comme la Grande charte et le Parlement anglais[53], ainsi qu’aux théories politiques relatives à l’égalité entre les hommes, aux droits naturels et à la souveraineté du peuple. Dans la seconde moitié du XVIIIe siècle, le terme démocratie était entré dans le langage courant. Cependant tout scepticisme n’avait pas disparu. La « Nouvelle Encyclopédie britannique » écrit à ce propos : « Même les auteurs de la constitution des États-Unis de 1787 étaient inquiets à l’idée de voir le peuple dans son ensemble participer à la vie politique. » Au lendemain de la Révolution française de 1789, les puissants et les nantis s’étaient également méfiés du peuple. Sous la plume  de certains constitutionnalistes[54] français, il ressort en effet que « la théorie de la représentation et de la souveraineté n’implique pas le suffrage universel, ni le suffrage direct : l’individu n’a aucun titre personnel à participer à l’opération électorale. La théorie de l’électorat-droit a été écartée et le suffrage se fait à deux degrés ». Selon un[55] des orateurs de l’Assemblée nationale constituante de 1789,  « la qualité d’électeur n’est qu’une fonction publique à laquelle personne n’a droit et que la société dispense ainsi que le lui prescrit son intérêt. La fonction d’électeur n’est pas un droit. »

Comme on le verra dans le prochain paragraphe, en ce qui concerne particulièrement les descendants des Gaulois, ce raisonnement leur a permis d’écarter, et ce jusqu’en 1848, le suffrage universel, qui est la conséquence nécessaire de l’électorat-droit, au profit d’un suffrage restreint bâti sur le cens.

1.Le suffrage censitaire ayant prévalu en France jusqu’en 1848

Le suffrage universel n’a pas été une donnée immédiate de la vie politique des pays occidentaux, en général. Avant qu’il ne s’impose, le suffrage restreint prédominait. Celui-ci subordonnait la qualité de l’électeur à diverses conditions : une certaine quotité d’impôt (vote censitaire), un niveau d’instruction (vote capacitaire) ou des attributs socio-démographiques (sexe, âge, nationalité, religion, etc. Par la suite, a succédé au suffrage restreint un suffrage plus étendu, voire « universel ». De nombreux pays occidentaux ont suivi ce schéma et les descendants des Gaulois ne pouvaient faire figue d’exception.

En effet, expliquent la grande majorité des politistes[56] et constitutionnalistes[57], le droit de vote a également connu une extension continue en France. Immédiatement après la Révolution de 1789, la Constitution de 1791 établissait clairement une distinction entre citoyens « actifs » et citoyens « passifs » à partir de leur seuil de contribution. De même, elle excluait du droit de vote les femmes et les domestiques. En effet, les uns et les autres, en raison de leur dépendance conjugale ou statutaire, étaient supposés incapables d’émettre leur propre opinion. En outre, le mode de scrutin était indirect[58] puisque les citoyens « actifs », au sein des assemblées primaires, désignaient des « électeurs » qui, à leur tour, votaient pour les futurs élus. Pour être « électeur » ou « élu », c’est encore une fois le montant des impôts payés qui était déterminant. Ainsi, un citoyen actif devait au moins s’acquitter l’équivalent de trois (3) journées de travail en impôt, un électeur l’équivalent de dix (10) journées de travail au moins, et un élu devait payer un mac d’argent (équivalent à deux cents (200) journées de travail) ou être propriétaire. Le suffrage censitaire permettait ainsi d’éliminer beaucoup de citoyens : « sur 24 millions d’habitants, écrivent les Professeurs Pierre BODINEAU et Michel VERPEAUX[59], ils n’y avaient que 4300 000 électeurs masculins ».

Se démarquant de cette conception, parce qu’elle pose que la souveraineté émane directement de la volonté générale, la Constitution française de 1793 édicte le suffrage universel. Elle prévoit en outre qu’un étranger domicilié en France depuis un an, vivant de son travail ou propriétaire, marié à une Française, père adoptif d’un enfant, ou ayant nourri un vieillard peut être électeur. Mais à peine ratifiés par les électeurs, cette Constitution est suspendue jusqu’à la paix au profit d’un gouvernement révolutionnaire[60]. Il faudra donc attendre 1848 pour que les Français, du moins les hommes, votent au suffrage universel direct.

De l’instauration du suffrage universel jusqu’en 1940, les gouvernements successifs en France ne sont revenus qu’à une seule occasion sur ce droit. En mai 1850, après les émeutes parisiennes de juin 1848 puis des partielles qui ont vu les Parisiens élire des députés de gauche, l’Assemblée avait amputé le corps électoral de près de trois millions (3 000 000) d’électeurs sur neuf (9). Il faut désormais, pour être électeur, être domicilié depuis trois ans dans la même commune. Il s’agit, selon les propos du président THIERS, de se débarrasser de « la multitude, la vile multitude qui a perdu toutes les républiques[61] ». L’un des prétextes du coup d’État de Louis-Napoléon Bonaparte, le 2 décembre 1851, était la restauration de ce droit plein et entier. Enfin, le régime dictatorial de Vichy constitue une rupture forte. Il ajourne les deux chambres avant de les supprimer : c’est, en effet, le chef de l’État, le maréchal PÉTAIN, qui exerce le pouvoir législatif, le pouvoir exécutif et une bonne part du pouvoir judiciaire. En cela, le régime de Vichy avait complètement rompu avec le suffrage universel comme source du pouvoir.

En substance, pour ce qui est du cas français relaté par de nombreux auteurs, le suffrage universel apparaît comme une conquête populaire datable : c’est en février 1848 que le peuple de Paris, soulevé contre la monarchie de juillet, l’impose dans la rue. Par décret du 2 mars 1848, le principe du « suffrage universel et direct », avait été établi. Mais il ne deviendra effectivement universel qu’à la faveur d’un élargissement progressif du corps électoral. Avec la construction européenne, on assiste néanmoins à un autre élargissement du droit de vote aux ressortissants de la communauté, conformément à la révision constitutionnelle du 25 juin 1992 qui, en dehors des « nationaux français », réserve le droit de vote « aux seuls citoyens de l’Union ».

II/ LE SUFFRAGE UNIVERSEL, UNE NOTION QUI A CONNU ET NE CESSE DE  CONNAITRE UN ÉLARGISSEMENT PROGRESSIF

Pour mémoire, de l’Antiquité grecque jusqu’à une bonne partie du 19e siècle, les leaders du COD-2020, dans leur grande majorité, peuvent évidemment l’attester à l’unisson : le suffrage n’était pas universel. Il ne le deviendra qu’avec la suppression du cens et l’élargissement du corps électoral aux femmes (A). Les débats contemporains, observe le Professeur Didier MAUS[62], portent sur la possibilité d’accorder, dans certains cas et pour certaines élections, le droit de voteà des étrangers (B).

1.La suppression du cens et l’élargissement du suffrage universel aux femmes

Avant que le suffrage universel ne s’impose dans les pays occidentaux, des restrictions en raison du sexe et du cens prévalaient. C’est à coup de réformes que le suffrage est devenu universel au XXe siècle. Ainsi, selon les explications du Professeur Didier MAUS, en Grande-Bretagne, plusieurs réformes partielles (1837, 1867, 1894…) avaient progressivement élargi le droit de suffrage jusqu’à l’établissement complet du suffrage universel masculin en 1918. Dix ans plus tard, le suffrage universel est étendu aux femmes. Il faut attendre enfin 1948 pour que le principe « un homme, une voix » soit parfaitement respecté et 1964 pour que le droit de vote soit fixé à dix-huit ans. Aux États-Unis, la majorité blanche s’était pendant longtemps opposée, surtout dans le Sud, à l’extension du droit de vote aux Noirs. Pour les hommes blancs, le suffrage devient théoriquement universel en 1842 avec la suppression du vote censitaire dans le dernier Etat le pratiquant. C’est en 1920 que le 19e amendement de la Constitution établit le suffrage universel des femmes. Ce n’est que le 24e amendement, en 1964, qui assurera théoriquement l’égalité des Noirs et des Blancs en interdisant de subordonner le droit de vote au paiement d’une taxe électorale. Le 26e amendement (1971) abaisse à dix-huit ans le droit de vote.

En France, les femmes étaient privées du droite de vote jusqu’à l’ordonnance du général de Gaulle du 21 avril 1944 dont l’article 17 s’énonçait ainsi qu’il suit : « Les femmes sont électrices et éligibles dans les mêmes conditions que les hommes. » Après cet acte fondamental, précisent certains auteurs[63], les françaises avaient pu utiliser pour la première fois un bulletin de vote lors des élections municipales du 29 avril 1945. La décision du général de Gaulle a permis que le suffrage universel devienne effectivement universel.

Si le suffrage était devenu universel, il n’en restait pas moins que dans les colonies, les populations indigènes n’avaient pas les mêmes droits électoraux que la Français. En effet, les réformes juridiques de mars 1944 n’ouvraient que parcimonieusement le scrutin aux populations colonisées. A l’exception de 70 000 musulmans qui votaient dans le même collège que les Français, les 1 500 000 restants votaient au sein d’un second collège destiné à élire les assemblées locales : c’est dans cette configuration que le président fondateur de la République centrafricaine avait été élu député à l’Assemblée nationale française.

A signaler qu’en France,  l’âge de la majorité électorale a été progressivement abaissé. Il est passé de 30 en 1815 à 25 ans en 1830 et à 21 ans en 1848. Jusqu’en 1974, le droit de vote n’était accordé qu’à partir de 21 ans. La loi du 5 juillet 1974 a abaissé la majorité civile et électorale à 18 ans. Cela a permis d’élargir à nouveau le corps électoral.

Après la reconnaissance du droit de vote aux femmes et l’abaissement de la majorité électorale, la tendance sur le continent européen est d’accorder ce droit, non pas aux réfugiés comme en Centrafrique, mais à des étrangers.

1.La possibilité d’accorder le droit de vote à des étrangers

Dans le cadre de l’Union européenne, le traité de Maastricht a prévu que les pays membres accorderaient le droit de vote et d’éligibilité (c’est-à-dire le droit d’être candidat et d’être élu) aux citoyens des autres pays membres de l’Union pour les élections aux conseils municipaux et au Parlement européen. En 1992, le Conseil constitutionnel français  a estimé que, pour l’élection aux Parlement européen, il n’était nul besoin de modifier la Constitution française, au motif que cette assemblée est étrangère à la souveraineté française et ne constitue pas un organe de la République[64]. Il a, en revanche déclaré qu’il convenait de modifier la Constitution pour les élections municipales. Un article 88-3 a donc été ajouté par la révision du 25 juin 1992. Il prévoit notamment que, « sous réserve de réciprocité et selon les modalités prévues par le traité sur l’Union européenne, […] le droit de vote et d’éligibilité aux élections municipales peut être accordé aux seuls citoyens de l’Union résidant en France. » Cette possibilité devrait fonctionner pour la première fois en 2001. En l’état actuel de la Constitution française, il n’est pas possible d’accorder le droit de vote à d’autres étrangers.

Comme les principaux leaders du COD-2020 ont pu aisément le constater à travers  son histoire tectonique dans les pays occidentaux, la notion du suffrage universel ne signifie nullement  « élection inclusive », « élection sur l’ensemble du territoire national », élection avec « la grande majorité des centrafricains », élection avec « un taux de suffrage » exorbitant ou extension du droit de vote aux réfugiés, comme le laisse supposer certains discours médiatiques et politiques. Exclusivement masculin depuis la Grèce Antique, le suffrage n’est devenu universel qu’au XIXe siècle, avec la reconnaissance du droit de vote aux femmes qui en étaient exclues. Le caractère universel se résume en la participation des hommes et des femmes à une élection. C’est ce qui découle assez logiquement de l’analyse ci-après de certains spécialistes de la science politique[65] : « La langue anglaise est plus précise que le français en distinguant le manhood suffrage (suffrage universel masculin, caractéristique par exemple du système mis en place en France en 1848) et le universal suffrage (incluant les hommes et les femmes) »

Dès lors, avant de contester publiquement la légitimité du président Faustin Archange TOUADERA au lendemain du verdict de la Cour constitutionnelle, les principaux leaders du COD-2020 devraient normalement se poser la question suivante : un « plus grand nombre possible » de femmes et d’hommes centrafricains, en âge de voter, n’avaient-ils pas participé librement, voire contre vents et marées dans certaines localités, à l’élection présidentielle du 27 décembre 2020, conformément à l’article 23 alinéa 3 de la Déclaration universelle des droits de l’homme de 1948 ? Au regard des suffrages valablement exprimés, les membres de la Cour constitutionnelle ont constaté que sur 1 858 236 inscrits, un « plus grand nombre possible » de femmes et d’hommes centrafricains (655 054) avaient effectivement participé à l’élection présidentielle du 27 décembre 2020. Des suffrages valablement exprimés, le candidat du MCU, à savoir le Professeur Faustin Archange TOUADERA a obtenu 318 626 voix (composées de voix masculines et féminines).

Par conséquent, proclamé définitivement élu à la majorité absolue des suffrages valablement exprimés, la légitimité du Professeur Faustin Archange TOUADERA ne saurait être contestée ou méconnue par qui que soit,  compris les principaux leaders du COD-2020. Autrement dit, l’on doit admettre que ces leaders du COD-2020 font encore une autre confusion entre deux notions juridiques bien distinctes, à savoir : « les électeurs » et « le peuple ». Si tel est le cas, l’auteur de ces lignes ne saurait résister au plaisir de partager avec ces principaux leaders du COD-2020 les excellentes réflexions[66] du Professeur Bruno DAUGERON sur les notions de « peuple », « citoyens » et « électeurs ». En effet, selon cet éminent publiciste, « ce n’est pas le peuple qui élit, et qui, à l’occasion d’une élection, va manifester une volonté, mais les électeurs[67] […] « le corps électoral, un organe de l’État ou non, n’est pas le peuple, car ce n’est pas le peuple qui est convoqué à élire ses représentants ou à se prononcer par référendum mais seulement lui, le corps électoral, qu’il prenne le nom de collèges électoraux ou d’électeurs ». Dès lors, renchérit le Professeur DAUGERON, en vertu d’une « fiction »[68] juridico-politique, « la volonté de la partie est regardée comme celle du tout : peu importe que certains électeurs n’aient pas voté dès lors qu’ils en avaient la possibilité. La volonté du corps électoral est censée être aussi celle des non votants ou de ceux qui n’ont pas contribué à élire le vainqueur ».

Si le Directeur de campagne du candidat MCU applique, de façon épistémologique, les analyses du Professeur DAUGERON aux contestations juridiquement et politiquement injustifiées de la réélection du Président Faustin Archange TOUADERA par les principaux leaders du COD-2020, la volonté des 17% d’électeurs centrafricains est censée être aussi celle des 65% qui n’ont pu, pour paraphraser un considérant de la décision des plus hauts juges, « aller exprimer librement leur choix malgré leur volonté de vouloir le faire » dans certaines parties du Territoire nationale. D’ailleurs, au cas où cela aurait échappé aux Conseils des candidats malheureux et aux membres de la Cour constitutionnelle, qu’il soit permis à l’auteur de ces lignes de rappeler qu’aux termes des dispositions de l’article 3 alinéa 2 du code électoral, « La circonscription électorale est constituée du  territoire national, du ressort territorial d’une ou de plusieurs représentations diplomatiques ou consulaires, ou est limitée au territoire d’une, deux ou plusieurs circonscriptions administratives ou collectivités territoriales, en tout ou partie. » Au regard de ces dispositions limpides et claires comme l’eau de roche, a-t-on vraiment besoin d’aller à la Sorbonne pour comprendre le sens du groupe de mots soulignés en gras, lequel groupe de mots indique clairement qu’une consultation électorale peut se dérouler sur soit la totalité soit sur une partie  seulement du territoire national ?

Par conséquent, au bénéfice des arguments irréfutables, inattaquables, incontestables et irréfragables exposés jusqu’ici, le Coordonnateur du Comité de soutien des Universitaires (CSU) chargé de Réflexions, Initiatives et Propositions (ci-après « le Coordonnateur CSU ») vient très respectueusement, par la présidente étude, prodiguer au nouveau Président démocratiquement élu le double conseil ci-après.

Primo, le Coordonnateur CSU conseille à Son Excellence, le Professeur Faustin Archange TOUADERA, Président de la République, Chef de l’Etat, de bien vouloir non seulement rester zen, mais surtout de ne point se soucier de la phraséologie des candidats malheureux tendant à dénier ou contester la légitimité de son second mandat. La contestation de ces derniers  est à ranger tout simplement au nombre de ce que Napoléon III qualifiait, il a y une belle lurette, de  l’ « esbroufe républicaine »[69].

Secundo, le Coordonnateur CSU conseille au nouveau Président démocratiquement réélu de bien vouloir s’atteler dans les préparatifs de la cérémonie de son investiture par la Cour Constitutionnelle qui  doit intervenir au plus tard le 04 mars 2021. En effet, la Cour constitutionnelle ayant déjà proclamé Votre Excellence  définitivement élu Président de la République, à l’issue du premier tour des scrutins groupés du 27 décembre 2020, le citoyen lambda se pose la  question de savoir s’il faudra attendre la date du 30 mars 2021 pour Votre investiture. En réponse à cette question légitime, il y a lieu de signaler que la date di 30 mars 2016 avait été discrétionnairement choisie par la Cheffe de l’État de Transition pour la promulgation de la Constitution. L’investiture d’un nouveau Président élu ne pourrait intervenir à cette date que si et seulement si un des candidats du COD-2020 était proclamé élu à l’issue des élections groupées du 27 décembre 2020. En d’autres termes s’il y avait effectivement une alternance dans l’exercice du pouvoir entre Votre Excellence et l’un de vos concurrents de l’opposition démocratique. Or, il n’en est absolument rien du tout, car Votre Excellence se succède à lui-même. Par ailleurs, le Coordonnateur CSU se permet de porter très respectueusement à l’attention votre Excellence qu’aux termes des dispositions de l’article 37 alinéa 2 de la Constitution du 30 mars 2016, « L’investiture, par la Cour constitutionnelle du nouveau Président élu intervient dans un délai de quarante-cinq (45) jours au plus tard après que la Cours ait vidé le contentieux électoral ».

Le contentieux de l’élection présidentielle étant déjà vidé le 18 janvier 2021, l’investiture devra absolument intervenir au plus tard le 04 mars 2021, à une date fixée discrétionnairement par votre Excellence. Conformément aux dispositions de l’article 39 de notre loi fondamentale de notre pays, « Dans les trente (30) jours qui précèdent la prestation du serment, le Président de la République nouvellement élu fait une déclaration écrite de patrimoine déposée au greffe de la Cour constitutionnelle qui la rend publique dans les huit (8) jours francs. » Une fois cette formalité remplie, le Coordonnateur CSU estime pour sa part que la cérémonie d’investiture de votre Excellence pourrait valablement se dérouler le 26 février 2021, c’est-à-dire quelques jours après la fête des amoureux (14 février). Dans la foulée et surtout dans le souci ardent de répondre urgemment aux aspirations du peuple centrafricain qui a bravé la menace des groupes armés pour aller accomplir son devoir civique le 27 décembre dernier, une nouvelle équipe gouvernementale pourrait même voir le jour au courant du week-end du 27 au 28 février 2021.

En définitive, Excellence, Monsieur le Président de la République réélu, pour vous rassurer dans votre position confortable, même si la grande majorité des Centrafricains avaient voté le 27 décembre 2020, un spécialiste de la sociologie politique[70] porte très humblement à la connaissance des principaux leaders du COD-2020 une vérité politique incontestable qui suit : « La légitimité ne fait jamais l’unanimité, et la population ne reconnaît pas complètement l’autorité des hommes politiques au pouvoir parce qu’il existe des classes ouvrières apathiques, des sous-cultures rebelles, des pacifistes et des terroristes armés ; toutefois, entre les extrêmes, il y a des gens en partie seulement convaincus par les prétentions de leurs dirigeants à la légitimité. »

Sur ce, le Coordonnateur CSU chargé de Réflexions, Initiatives et Propositions vous souhaite bon vent tout au long de votre second mandat.

Fait à Bangui, le 24 janvier 2021

 Alexis N’DUI-YABELA,

Maître de conférences à l’Université de Bangui,

Coordonnateur du CSU chargé de Réflexions, Initiatives et Propositions.

Voir Actes 2, 1-13, in Le Nouveau Testament illustré, traduit en français courant d’après le texte grec, Paris, IMPRIMATUR, 1996, p.300-301.

[2] Voir J. de La Fontaine, Fables, Paris, Bookking International, 1993, notamment « Le Loup et l’Agneau », p.23.

[3] M. ZIGUÉLÉ, « Déclaration relative aux élections en cours en République centrafricaine »

[4] Voir Déclaration du 21 janvier 2021 « relative aux résultats du Premier tour de l’élection présidentielle du 27 décembre 2020 », disponible en ligne à l’adresse : https://corbeaunews-centrafrique.com/ (consulté le 21 /01/21).

[5] Voir leur pertinente analyse intitulée, « COD-2020 : imbroglio, paradoxes et parjure », in Médias Plus n°2515 du vendredi 22 janvier 2021, p.5.

[6]Voir B. SELEMBI DOUDOU dans sa chronique intitulée « Centrafrique : l’arbitrage attendu de la cour constitutionnelle après l’échec du dispositif national de sécurisation des élections. », disponible en ligne à l’adresse :https://corbeaunews-centrafrique.com/centrafrique-larbitrage-attendu-de-la-cour-constitutionnelle-apres-lechec-du-dispositif-national-de-securisation-des-elections/ (consulté le 03/01/21).

[7] Voir dictionnaire Larousse Compact Plus, p.1281.

[8]Pour l’essentiel, voir M-A. COHENDET, « Légitimité, effectivité et validité », in Mélanges Pierre AVRIL, pp. 201-234 ; N. BOBBIO, « Sur le principe de légitimité », in Droits, n n°32, 2000, pp.147-163.

[9] V. DOUDANE dans sa chronique intitulée, « Elections, fraudes, contestations, rébellion : le président déclaré élu est-il légitime ? », in La Plume n°836 du mardi 05 janvier 2021, p.2.

[10] Voir Déclaration n°0081/COD-2020/CP/SEP.21 relative à la proclamation des résultats définitifs de l’élection présidentielle du 27 décembre 2020 par la Cour constitutionnelle.

[11] Voir leur Communiqué de presse conjoint du 21 janvier, notamment le troisième paragraphe où les mots « Centrafricaines et Centrafricains » sont rédigés en lettre capitale.

[12] Voir F. AKOBENDÉ et M. MADIDÉ-ALADILA précités.

[13] Voir « Déclaration préliminaire de la Mission d’observation des Experts électoraux de la CEMAC », p.4.

[14] Voir « Déclaration préliminaire du Groupe international pour la promotion de la démocratie et du système électoral du 29 décembre 2020 », p.7.

[15] J. ROBERT, « De l’indépendance des juges », in Revue de droit public, n°, 2016, pp.6-15.

[16] Voir A. RAY et S. CHANTREAU, Dictionnaire des expressions et locutions, Paris, 2e édition mise à jour, Dictionnaire LE ROBERT/VUEF, coll. « les usuels », 2002, p.780. Cette expression signifie « Sans discernement, n’importe comment ».

[17] P. AVRIL et J. GICQUEL, Lexique de droit constitutionnel, Paris, Puf, coll. « Que sais-je ? », 2004, p.3.

[18]A cet égard, lire la dépêche intitulée, « Centrafrique : les avocats de dix candidats à la présidentielle saisissent la Cour constitutionnelle d’un recours en annulation », disponible en ligne à l’adresse : https://letsunami.net/ (consultée le 08/01/21).

[19] A ce propos, lire  la dépêche d’E. YAMALE intitulée, « Centrafrique : Pr Danièle Darlan, annulez « ces foutues d’élections » comme l’a fait la cour constitutionnelle du Malawi ! », disponible en ligne à l’adresse : https://letsunami.net/centrafrique-pr-daniele-darlan-annulez-ces-foutues-delections-comme-la-cour-constitutionnelle-du-malawi/ (consultée le 08/01/21).

[20] Voir chronique de Jean-Paul NAIBA intitulée, « Honte à vous, Assassins de la Démocratie et Liquidateurs de la Liberté en Centrafrique ! », in L’Expansion n°1643 du 22 janvier 2021, p.5.

[21] Voir chronique intitulée, « Le HCR assure la participation des réfugiés à l’élection présidentielle en RCA », disponible en ligne à l’adresse : https://www.unhrc.org/fr/news/stories/2016/2/56be05a5c/hcr-assure-participation-refugies-centrafricains-lelection-presidentielle.html (consultée le 22/01/21).

[22] A ce propos, voir M.-A. COHENDET, Droit constitutionnel. Cours. Travaux dirigés. Conseils de méthode. Exercices. Sujets d’examen. Corrigés, Paris, LGDJ/Lextenso éditions, coll. « COURS », 2013, p.463. Selon cet auteure, « L’interprétation génétique » recherche l’intention des géniteurs, des auteurs (ou à défaut des rédacteurs) du texte.

[23] Ph. VALODE, Les Présidents de la République, Paris, EditionsFirst, 2007, pp.19-28. Docteur en droit, auteur de remarquables études historiques, membre de l’Académie française et de l’Académie des sciences morales, Thiers fut« un esprit brillant ».

[24] M. OFFERLE, Un homme une voix ? Histoire du suffrage universel, Paris, Gallimard-Découverte, 1993, p.24.

[25] J. BARTHELEMY, Traité de droit constitutionnel, Paris, Sirey, 1933, p.310.

[26] [26] B. DAUGERON, « Les électeurs sont-ils le peuple ? Peuple, citoyens, électeurs en droit constitutionnel : essai de distinction théorique », in La Constitution, l’Europe et le droit en mouvement. Mélanges en l’honneur du Doyen Jean-Claude MASCLET, Publications de la Sorbonne, 2013, pp.155-184.

[27] « Art.7. –Le peuple souverain est l’universalité des citoyens français ».

[28] « Art.2. – L’universalité des citoyens français est le souverain ».

[29] « Art. premier – La souveraineté réside dans l’universalité des citoyens ».

[30] B. DAUGERON, op. cit., p.160.

[31]Décision du 04 janvier 2021 portant publication des résultats provisoires de l’élection présidentielle du 27 décembre 2020.

[32] Voir chronique intitulée, « Centrafrique : ‘’la question de la légitimité du président Touadéra n’est pas légale mais politique’’, selon Me Nicolas Tiangaye », disponible en ligne à l’adresse : https://letsunami.net/ (consulté le 21/01/21).

[33] Pour des détails, voir D. CHAGNOLLAUD, Science politique, 3e édition, Editions Dalloz, coll. « COURS », 2000, pp.45-52.

[34] M. DOGAN, « La légitimité politique : nouveauté des critères, anachronisme des critères classiques », in Revue internationale des sciences sociales, 2010/2 (n°196), pp.21-39. Dans cet article, Mattei DOGAN explique que des trois types de légitimité définis par Max WEBER il y a plus d’un siècle, deux (le traditionnel et le charismatique) sont quasiment inapplicables aujourd’hui. Le seul à conserver sa validité est le troisième, la légitimité rationnelle, mais c’est devenu un amalgame de nombreuses variétés différentes, une collection incohérente de cas dont la diversité fait que ce type n’est plus significatif. La typologie de WEBER se trouve ainsi déconnecté du monde contemporain. L’article présente une analyse empirique des raisons de cette obsolescence et démontre la nécessité de renouveler les distinctions : il insiste en particulier sur le rôle des élites dans les processus de légitimation et de délégitimation.

[35] Pour une approche simplifiée, se reporter à M. HASTINGS, Aborder la science politique, Paris, Editions du Seuil, coll. « MÉMO », 1996, pp.29-31.

[36]« Légitimation et délégitimation », Revue internationale des sciences sociales, n°196, Vol.61, 2013.

[37] J. BAUDOUIN, Introduction à la science politique, Paris, 4e édition, Editions Dalloz, coll. « MÉMENTOS », 1996, p.39.

[38] Idem, p.90.

[39] Voir Décision n°003/CC/21 du 18 janvier 2021, p.17

[40] J. ROBERT, « L’indépendance des juges », Revue de droit public, n°6/1988, pp.5-22 (+ VI annexes).

[41] Voir chronique intitulée « Centrafrique : l’Appel du 14 janvier 2021 du président du Chemin de l’Espérance Abdoul Karim Méckassoua », disponible en ligne à l’adresse : https://letsunami.net/centrafrique-lappel-du-14-janvier-2021-du-president-du-chemin-de-lesperance-abdoul-karim-meckassoua/(consulté le 15/01/21).

[42] Ph. BLACHER, Droit des relations internationales, Paris, 3e édition, Litec, 2008, pp.80-81.

[43] J.-M. DENQUIN, Introduction à la science politique, Paris, 2e édition, Hachette Livre, coll. « Les fondamentaux », 2001, p.89. Pour cet auteur, « Le fait de voter constitue objectivement un acte politique puisque c’est à travers lui que s’opère la désignation des gouvernants. »

[44] C. LAGEOT et S. PAVAGEAU, Eléments de culture politique, Paris, Editions Ellipses Marketing S.A, coll. « OPTIMUM », 2008, p.28.

[45] Ph. REINHARD, La Politique pour les Nuls, Paris, Editions First, 2007, p.27.

[46] M. CHAULANGES et S. CHAULANGES, L’éveil à l’histoire. Cours élémentaire, Paris, Librairie Delagrave, 1975, pp.5-9.

[47] Pour l’essentiel, se reporter à la « Fiche 10 : La démocratie athénienne », in F. LAMBERT e S.LEFRANC, 50 fiches pour comprendre la science politique, Paris, Editions Bréal, 2003, pp.42-45.

[48] D. G. LAVROFF, Histoire des idées politiques de l’Antiquité à la fin du XVIIIe siècle, Paris, 4e édition, Editions Dalloz, coll. « Mémentos », 2001, p.9.

[49] Voir F. AMANRICH, Comprendre les systèmes politiques, Lyon, Editions de la Chronique sociale, 2001, p.15.

[50] Il s’agit des cantons d’Obwald, Nidwald, Appenzell Rhodes-Extérieures, Appenzell Rhodes-Intérieures et Glaris.

[51] P. PACTET, Institutions politiques et droit constitutionnel, Paris, 18e édition, Éditions Armand Colin, 1999, p.89.

[52] Pour une approche simplifiée de cette notion, lire « Les principes de la démocratie représentative », in P.Y. BAUDOT et Th. RIBÉMONT (dir.), Science politique, Paris, Éditions Foucher, coll. « LMD Fiches », 2010, pp.35-38.

[53] Pour un exposé synthétique de ces institutions, voir D. LOCHACK, Les droits de l’homme, Paris, Nouvelle édition, La Découverte, 2005, pp.17-20.

[54] P. BODINEAU et M. VERPEAUX, Histoire constitutionnelle de la France, Paris, Puf, coll. « Que sais-je ? », 2000, p.16.

[55]Il s’agit du député BARNAVE cité par P. BODINEAU et M. VERPEAUX précités.

[56]Pour l’essentiel, voir M. OFFERLE, Un homme une voix ? Histoire du suffrage universel, op.cit. ; F. MATONTI, Le comportement politique des Français, Paris, Éditions Armand Colin, coll. Synthèse, série « Histoire », pp. 8-10.

[57]Pour l’essentiel, voir D. CHAGNOLLAUD, Histoire constitutionnelle et politique de la France (1789-1958), Paris, Dalloz, coll. « COURS », 2002, 397p. ; P. BODINEAU et M. VERPEAUX, Histoire constitutionnelle de la France, op.cit., 126 p.

[58]  B. DAUGERON, « La notion de suffrage universel indirect », in Revue française d’histoire et des idées politiques, (Théories du suffrage politique dans la France du XIXe siècle), n°38, 2e semestre, 2013, pp.329-336.

[59] Voir leur ouvrage précité, p.17.

[60] Pour des détails, voir D. CHAGNOLLAUD, op.cit., pp.45-50.

[61] M. OFFERLE, op. cit., p.24.

[62] D. MAUS, Aborder le droit constitutionnel, Paris, Éditions du Seuil, coll. « Mémo », 1998, p. 35.

[63] V. HELT-MALZ et P-H LÉVY, Les femmes et la vie politique française, Paris, Puf, coll. « Que sais-je ? », 2000, p.25.

[64] Décision n°92-308 DC, 9 avril 1992.

[65] Voir O. NAY (dir.), Lexique de science politique. Vie et institutions, Paris, Éditions Dalloz, 2008, p.522.

[66] B. DAUGERON, précité.

[67]Idem, p.157.

[68]Idem, p.174.

[69]Voir « Napoléon III : ma dictée d’outre-tombe », in Les dicos d’ors, Les dictées de Bernard Pivot : l’intégrale, Paris, Éditions Albin Michel, 2004, p.524.

[70] M. DOGAN, « La légitimité politique : nouveauté des critères, anachronisme des critères classiques », op. cit., p.22.

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