Bangui, le 21 septembre 23
Les débats sur la question démocratique épargne souvent le rôle et la responsabilité des opposants politiques. L’opposition fait partie prenante des groupes armés qui ressemblent à une aventure ambiguë annihilant toute possibilité de la stabilité du pays. Cette opposition n’ouvre, bien évidemment, aucune perspective de changement, d’évolution politique d’une république se disant, pourtant, démocratique. Ce Centrafrique, l’obsolescence subite des partis d’opposition regroupés dans le BRDC est honteuse et alarmante.
La question mérite d’être posée : à quoi sert l’opposition politique en Centrafrique ? De manière plus générale, à quoi servent les opposants politiques dans un processus démocratique ? Les opposants ne devraient-ils pas empêcher ou minimiser la gouvernance en contrebalançant les actions positives et les points de vue politiques ? Certes, en Centrafrique, le manque du sens de patriotisme ne leur permet pas de contribuer au développement du pays voire les intérêts voulus par leurs compatriotes. Malgré cela, ont-elles même simplement essayé de jouer leur rôle, de ramer à contre-courant, mais dans le mauvais sens ? Dans la plupart des cas, les opposants politiques sont des ennemis de leurs compatriotes centrafricains. Pourquoi ?
Le cas du BRDC témoigne d’une décadence voire d’une incapacité à se poser comme parti d’opposition digne et prometteur ; ne serait-ce que pour leurs agitations sur fond de clientélisme, de promesses politiciennes et de contribution aux actions des groupes armés. Fait-on face à des oppositions hyper-présidentialistes ? L’on peut répondre par l’affirmative, et aller plus loin en notant que la présence des éternels opposants qui n’ont plus d’idées enrichissantes pour l’évolution politique de leur formation pose un vrai problème de renouvellement des élites voire constitue même un frein dans un processus démocratique qualitatif. D’éternels leaders politiques comme ceux du BRDC semblent faire de la politique un éternel métier. Une situation qui ne laisse, bien évidemment, aucune perspective aux jeunes qui ont souvent le choix entre hurler leur colère et voir indiquer la porte de sortie ou carrément se désintéresser de la politique.
Un renouvellement des leaders d’opposition africains est donc une nécessité dans un pays dont la jeunesse est le premier potentiel économique pour plus de représentativité et plus de responsabilité des acteurs politiques. C’est également une façon de renouveler, varier et faire évoluer les idées et les compétences. Opposant éternel ne rime pas forcément avec compétence politique. Un renouvellement des élites est, dès lors, plus que nécessaire, elle est obligatoire. Force est de reconnaître qu’en Centrafrique, l’opposition politique s’est laissée corrompre par l’Occident et les chefs rebelles, signe d’un complot contre le peuple pouvant plonger le pays dans l’instabilité.
Un leader de la société civile avait raison de soutenir que nul parti politique ne peut être longtemps solide sans une volonté du peuple. Le cas centrafricain n’est que la résultante d’un long processus de désintéressement vis-à-vis des opposants du BRDC. L’opposition n’a pourtant pas seulement un rôle de contestation, de destruction. Un opposant démocratique est un acteur de la vie politique, œuvrant pour plus de démocratie, plus de respect des engagements des dirigeants, plus de débats dans l’espace public.
Pour plus de démocratie, pour des représentants politiques plus responsables et soucieux de la cause publique, bref pour une politique plus noble et plus saine, nos opposants politiques doivent prendre conscience de leur mission. Il ne s’agit pas de tenir un éternel et redondant discours démagogique. Il ne s’agit pas non plus d’avoir à l’esprit une éternelle critique stérile encore moins une velléité de seulement détruire sans être une force de propositions. Il s’agit de contribuer à l’évolution des idées et des pratiques politiques. Il s’agit de prendre part à un projet collectif noble et humaniste dans un vrai processus démocratique.
Une démocratie de façade fera long feu. Elle débouche sur une désintégration progressive des bases constitutionnelles et institutionnelles, sur une remise en cause de la structure étatique prélude à son effondrement. L’enjeu n’est pas une querelle de personnes mais d’œuvrer pour le bien public. Les forces d’opposition actuelles ont une très grande part de responsabilité dans l’immobilisme politique, quand elles ne précipitent pas leur effondrement.
@Pierre BECHEGO