Centrafrique : Le ministre Issa Bi-Hamadou, l’homme du terrain donne son point de vue sur l’évolution de l’Accord de paix, le groupe armé 3R…

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Bangui, le 06 août 19

Le ministre délégué à l’Administration du Territoire, de la Décentralisation et du Développement Local

Le Ministre Délégué, à l’Administration du Territoire, de la Décentralisation et du développement Local  Issa Bi-Hamadou, rompt le silence sur l’Accord politique de paix et de la réconciliation signé entre le gouvernement et les 14 groupes armés. Profitant du micro de lepotentielcentrafricain.com, ce dernier a profité de l’occasion de son entrée dans le gouvernement, les hostilités enregistrées récemment dans l’Ouham-pendé et autres réactions sur la situation politique de l’heure. Le ministre Issa Bi-Hamadou pour ceux qui ne savent pas, n’est pas celui qu’on le traite de n’importe qui. Notre Rédaction a bien voulu rencontrer le ministre Issa Bi-Hamadou pour une interview exclusive…

Lepotentielcentrafricain.com (LPC) : Bonjour Monsieur le Ministre veuillez-vous présenter à nos lecteurs ?

Issa Bi-Hamadou (IBH) : Bonjour, je suis d’abord un centrafricain, j’ai été choisi par son Excellence le Premier Ministre Chef du Gouvernement M. Firmin Ngrébada qui m’a proposé au Président de la République son Excellence Pr Faustin-Archange Touadéra à la sortie de la signature de l’Accord de paix le 06 février 2019, négocié à Khartoum et signé à Bangui.

LPC : Dites-nous comment le choix a été porté sur vous pour entrer dans le gouvernement et au nom de quelle entité politique ou groupe armé ?

IBH : Le Premier Ministre a porté son choix sur moi au nom de l’entité 3R, qui avait d’abord, présenté plusieurs candidats, et il appartenait au Premier Ministre de choisir la personnalité ayant un profil requis pour entrer au gouvernement.

LPC : Comment sentez-vous depuis que vous gérez une partie de ce grand Département en tant que ministre délégué ?

Je me sens à l’aise, puisque j’étais d’abord un maire de Commune (d’élevage de Nièm-yéléwa) avant d’être ministre. J’ai été fonctionnaire employé de service d’élevage pendant plus de vingt ans, après la fin de ma formation d’ingénieur agronome à l’ISDR de M’Baïki. J’ai servi mon pays pendant plus de vingt ans en tant qu’animateur d’abord et ensuite, formateur régional.

J’ai été sollicité pour travailler dans les organisations internationale (DRC) pour mon expertise et qui a fait de moi, chargé de programme de relèvement précoce dans la région de Paoua entre 2007, 2009 et en 2011, cette Organisation m’a fait confiance en me nommant Chef d’antenne dans la région de Bocaranga et Ngaoudaye. Après un moment donné, le développement des activités ont également permis d’affecter un autre responsable à Ngaoudaye et je me suis occupé de Koui et de Bocaranga. Donc, je suis un homme de terrain et formateur des formateurs.

Je trouve que là, on m’a confié la charge de développement local et je crois que le Premier Ministre me connait depuis le Collège de Boy-rabe qui est devenu aujourd’hui le Lycée de Gobongo et on s’est retrouvé entre au CNT, pendant la période de la Transition et j’étais membre du bureau en tant que Rapporteur général et le Premier Ministre connaissait bien mon profil et je me sens à l’aise de travailler avec lui et surtout en ce qui concerne le développement local dont j’ai la charge avec mon ministre de tutelle avec qui, on s’entend très bien. C’est difficile aujourd’hui d’évaluer le résultat de ma fonction après six mois d’activités, nous vous donnons rendez-vous dans quelques mois pour faire le point du gouvernement à mi-parcours.

LPC : On parle de vous en tant que Représentant du Chef rebelle Sidiki des 3R dans le gouvernement. Confirmez-vous cela ? Si oui, qu’est-ce qui justifie la violation constante de l’Accord de paix par ce groupe armé dans l’Ouham-pendé ?

IBH : Comme tout le monde, j’ai été surpris par cette nouvelle sur les ondes. Mais le général Sidiki a démontré avec A plus B, qu’il a condamné ces violations perpétrées par des individus non-identifiés, notamment les éléments criminels qui sont infiltrés dans son groupe et qui ont causé des crimes graves, il a dégagé sa responsabilité. Apres ces hostilités, nous nous sommes rendus sur le terrain pour constater les faits, la mission gouvernementale conjointe avec les garants c’est-à-dire les Nations-Unies, l’Union Africaine et la CEEAC. Nous étions accompagnés par les députés de la zone, entre autres, l’Honorable Martin Ziguélé et Timon-Léon M’Baikoua qui étaient sur place avant. Nous avons vu des tombes, nous avons écouté des témoignages tristes.

Comme je vous l’avais dit, j’ai vécu là-bas en tant que chargé de programme et de développement rural en matière d’agriculture et d’élevage et j’allais dans ces villages là et peut-être ceux qui sont mort là, certains je les connais, alors c’était ignoble.

Et le général Sidiki a condamné ces crimes horribles et ces criminels ont agi de leur propre gré, il a dégagé sa responsabilité en mettant à la disposition de la justice des éléments qui ont reconnu avoir commis ces crimes et il appartient aujourd’hui à la justice de trancher. Est-ce que Sidiki est responsable ? Il est commanditaire ? Y’a-t-il un autre responsable politique ?

Il appartiendra à la justice centrafricaine de faire son travail et je souhaiterai que ce débat soit public pour que le peuple écoute. Puisqu’il y’a trop d’amalgame au tour de cette question, on m’a même accusé d’avoir comparé les morts aux morts des bétails, c’est qui est faux ! En effet, c’est mon compte Facebook a été piraté pour  inciter à la haine au sein de la communauté pour discréditer le gouvernement auquel je représente.

LPC : Que dites-vous sur les crimes et autres actes d’hostilités survenues dans les sous-préfectures de Paoua et Bocaranga ?

IBH : J’ai apprécié le faite que le général Sidiki a accepté de remettre les premiers responsables de ces crimes qui, le jour-j du procès, ils nous diront qu’ils étaient combien et pourquoi ils ont agi de la sorte.

Je vous garantis que tous les responsables qui seront cités par ceux-là, vont se présenter devant la justice et moi je n’hésiterai pas un seul moment dans la mesure où mon nom sera cité, de me mettre à la disposition de la justice de mon pays.

LPC : Les informations qui nous sont parvenues font état de votre probable démission du gouvernement ? Confirmez-vous cela ?

IBH : C’est une fausse information, je n’ai aucune raison de démissionner,

je suis en bon terme avec le Premier Ministre chef du gouvernement M. Firmin Ngrébada, que j’admire son leadership, puisque c’est une nouvelle école pour moi, je vous dis sincèrement que serai heureux de rester aussi longtemps que possible.

LPC : Certaines sources parlent également de tension entre vous le premier ministre qui, lors de la réunion d’évaluation de l’Accord de paix à la Présidence, vous étiez rabrouer publiquement. Qu’est-ce qui s’est passé exactement ?

IBH : Vous savez, avant de devenir ministre, j’ai été chef traditionnel et je le suis jusqu’aujourd’hui, je suis dépositaire des valeurs morales de la communauté Peulh de Centrafrique.

LPC : Pour finir, les nouvelles en provenance de Koui, Nièm-yéléwa parlent de colère manifestée des combattants des 3R qui ne veulent plus de vous, car vous les représentez dans le gouvernement sans autant faire le feedback. Donc, vous serez remplacé selon eux. Que dites-vous ?

Il me serait très étonnant d’apprendre par vous que la population ou encore les combattants me désavouent dans la mesure où elle m’accepte comme leur chef traditionnel. C’est des allégations tendant à discréditer le gouvernement. Vous savez, dans un groupe, il peut y avoir des contradictions et des avis divers sur certains points. Arrivé à un moment donné, je n’ai pas été d’accord par rapport à la lenteur de la mise en œuvre des engagements dans l’APPR-RCA pour les groupes armés, je me suis dit si on était pas prêt, pourquoi on aurait signé un Accord et qu’on aurait décliné le chronogramme de la mise en œuvre dans cet Accord.

Il a été prévu la mise en œuvre du programme DDRR qui permettrait de constituer les Unités Spéciale Mixte de Sécurité (USMS). Mais à un moment donné, le Ministère en charge du DDRR avait eu des difficultés puisque, les combattants avaient ralentis les élans dans leurs engagements.

Et on avait un quota de 130 hommes à donner pour constituer les USMS. Mais, lorsque le Ministère en charge du DDRR partait pour désarmer les gens, on nous a présenté que 34 hommes du côté des 3R, c’est ça qui a failli créer un différend interne, parce que, à mon avis, il n’y a pas des raisons pour qu’on traîne les choses, alors que les autres ont donné leurs hommes. On devrait faire une progression arithmétique dans l’espace et le temps. Alors, s’il s’agit de désarmer, on désarme tout le monde et aussi libérer tous les villages. C’était ça ma vision ! Mais la compréhension de la mise en œuvre de l’Accord n’était pas acquise par les combattants, c’est le général Sidiki qui avait demandé qu’une campagne de sensibilisation soit menée pour expliquer à ces jeunes, l’importance du DDRR.

Les combattants ont été surpris un matin de voir des gens qui sont venus les désarmer et beaucoup ont refusé de donner leurs armes, puisqu’ils ne connaissent pas les avantages liés à ce processus, c’était le général Sidiki qui avait ordonné pour qu’ils puissent exécuter, mais timidement.

Même au niveau de la mise en œuvre de l’Accord, il y’a quand même des vices et je ne partage pas ça. Pour votre gouverne, les 3R n’ont pas l’objectif de prendre le pouvoir, ils sont venus juste parce qu’il y’avait une volonté d’extermination d’une communauté, on volait les bétails des peulhs et aussi on voulait ramener le conflit à une guerre confessionnelle, comme certains le disent.

Aujourd’hui, la RCA est victime de sa potentialité économique et naturelle, elle dispose 25 millions d’hectares de terre pâturage qui seulement 9 millions sont exploités chaque année, la RCA dispose aussi 15 millions de terre des labours. Mais, on exploite à peine que 700 milles par an et ensuite 36 milliards de m3 des eaux de surfaces, toutes ces ressources sont convoitées par nos voisins qui sont sous pression de désertification au Sahel et sont entrain de vouloir migrer en RCA dans les zones vertes. Alors posez-moi la question, pourquoi la Transhumance ?

C’est un mouvement transfrontalier reconnu par les Institutions sous régionale. Alors les USMS n’est qu’une des mesures de contrôle pour réglementer les couloirs qui est un facteur générateur de revenu. L’APPR en son article 14-15 prévoit que, les engagements pris par les parties doivent faire de couloir de transhumance une activité socio économique de la RCA et pour la sécurité des éleveurs et agriculteurs. Mais qu’est ce qu’on remarque aujourd’hui ?

Les gens ne prennent pas l’attention à un aspect, le nomadisme, c’est des gens qui quittent une zone complètement tari et qui recherchent de nouvel espace pour s’installer, alors ils viennent chez nous parce que nous avons encore des espaces suffisamment riches, c’est même pourquoi on demande de donner une partie de nos eaux pour le Lac Tchad, parce que nous disposons d’énormes potentialités qui dépassent notre capacité d’absorption nationale.

C’est des richesses que la nature nous a offert que nous pouvons exploiter pour mettre en valeur le projet intégrateur pour le développement de la RCA.

LPC : Je vous remercie Monsieur le ministre.

IBH : C’est moi qui remercie monsieur le journaliste.

Propos recueillis par Hervé BINAH,                                                  

 

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