Bangui, le 01 aout 18
Dans son rapport à mi-parcours daté du 23 juillet 2018 et adressé au Président du Conseil de Sécurité, le Groupe d’Experts sur la République centrafricaine, dénonce les déplacements de l’ancien président François Bozizé avec un passeport diplomatique sud-soudanais et ce, en violation des sanctions des Nations qui lui font interdiction de voyager hors du pays où il réside. Ce même rapport fait état de la dégradation de la situation sécuritaire tant à Bangui qu’à l’intérieur du pays ainsi que le développement des trafics illicites du diamant centrafricain. Ci-dessous l’intégralité dudit rapport
Bilan à mi-parcours du Groupe d’experts sur la République centrafricaine reconduit
Bilan à mi-parcours du Groupe d’experts sur la République centrafricaine reconduit dans son mandat par la résolution 2399 (2018) du Conseil de sécurité (S/2018/729)
REPORT from UN Security Council
Published on 23 Jul 2018
Lettre datée du 23 juillet 2018, adressée au Président du Conseil de sécurité par le Groupe d’experts sur la République centrafricaine reconduit dans son mandat par la résolution 2399 (2018) du Conseil de sécurité.
Les membres du Groupe d’experts sur la République centrafricaine reconduit dans son mandat par la résolution 2399 (2018) ont l’honneur de vous faire tenir ci-joint leur bilan à mi-parcours, conformément au paragraphe 32 c) de la résolution 2399 (2018).
Le rapport a été transmis le 9 juillet 2018 au Comité du Conseil de sécurité créé par la résolution 2127 (2013) concernant la République centrafricaine, lequel l’a examiné le 20 juillet 2018.
Le Groupe d’experts vous serait reconnaissant de bien vouloir porter le texte de la présente lettre et du rapport à l’attention des membres du Conseil de sécurité et de le faire publier comme document du Conseil.
Le Coordonnateur du Groupe d’experts sur la République centrafricaine reconduit dans son mandat par la résolution 2399 (2018)
Résumé
Confirmant les difficultés rencontrées par le Gouvernement pour avancer sur la voie de la paix, de graves flambées de violence se sont produites pendant la période considérée, y compris dans des régions où la situation s’était améliorée, comme Bangui et Bambari. L’« opération Sukula», menée conjointement par la Mission multidimensionnelle intégrée des Nations Unies pour la stabilisation en République centrafricaine (MINUSCA), les Forces de sécurité intérieure et les Forces armées centrafricaines (FACA) dans le quartier PK5 à Bangui les 7 et 8 avril 2018, a entraîné un accroissement des tensions inter-communautaires, dont des cas d’incitation à la discrimination et à la violence, et une série de violents combats, de début avril à début mai, qui ont fait pendant cette période de 30 jours le plus grand nombre de victimes dans la capitale depuis 2014, 70 personnes au moins ayant été tuées et 330 blessées, pour la plupart des civils.
La MINUSCA et les forces nationales de sécurité n’ont pas réussi à démanteler les bases des groupes d’autodéfense du PK5 pour y installer les Forces de sécurité intérieure ; au contraire, l’opération a conduit au renforcement de l’emprise des groupes d’autodéfense sur le quartier.
À la suite des notifications adressées au Comité du Conseil de sécurité créé par la résolution 2127 (2013) concernant la République centrafricaine et des dérogations accordées, les forces de sécurité et les forces armées du pays ont reçu une formation et du matériel militaire de la Fédération de Russie. Cette action, conjuguée à l’appui apporté par d’autres partenaires, telle la mission militaire de formation de l’Union européenne en République centrafricaine, a facilité le retour en phase opérationnelle des FACA.
Le redéploiement en cours des FACA et l’« opération Sukula», considérés par les factions de l’ex-Séléka comme des actes hostiles envers la communauté musulmane, ont contribué au durcissement de la position de ces groupes, en particulier le Front populaire pour la renaissance de la Centrafrique (FPRC). De ce fait, les dirigeants du FPRC, Abdoulaye Hissène et Noureddine Adam, tous deux visés par des sanctions, ont continué de chercher à réunifier la Séléka, redoublé d’efforts pour acquérir des armes, en particulier depuis le territoire du Soudan, et consolidé l’administration parallèle dans les zones sous leur contrôle afin d’en faire leur principale source de financement.
À l’instar d’autres groupes armés, les factions de l’ex-Séléka ont cependant continué de prendre part à l’Initiative africaine pour la paix et la réconciliation en République centrafricaine, au titre de laquelle les consultations ont commencé en novembre 2017 et un accord entre le Gouvernement et les 14 groupes armés reconnus devrait être conclu dans les mois à venir.
Les combats qui se poursuivent ont donné lieu à des violations des droits de l’homme et du droit international humanitaire, tant par les combattants anti-balaka que par les combattants de l’ex-Séléka, notamment à des agressions sexuelles et des viols généralisés (dans la région de Bossangoa), des massacres aveugles de civils et des attaques ciblées contre le personnel et les bases humanitaires (près de Markounda, de Bambari et de Bangassou). Les éléments armés ne respectant pas les installations médicales, l’accès de la population civile aux soins de santé à Bangui et Bambari a été limité. Depuis le début de 2018, cinq soldats de la paix ont également été tués dans des attaques ciblées.
Alors que les combattants anti-balaka continuent d’utiliser des munitions de chasse, le dialogue entre le Groupe d’experts sur la République centrafricaine et la République du Congo a amené les autorités congolaises à annoncer des mesures visant à mieux réglementer la vente de munitions par la Manufacture d’armes et de cartouches du Congo.
Dans le présent rapport, le Groupe d’experts décrit également la dégradation de la dynamique positive qui avait suivi la levée de la suspension des exportations de diamants au titre du Processus de Kimberley. Depuis la fin de 2017, on a constaté un recul notable du commerce légal et une recrudescence connexe du trafic de diamants bruts en raison de la fermeture de la plupart des bureaux d’achat dans les provinces. Le Groupe d’experts évoque également le fait que l’État contrôle mal les aéroports et les répercussions que cela a sur le trafic de ressources naturelles.
Enfin, le Groupe d’experts aborde de nouveaux cas de violation des sanctions, en particulier des violations de l’interdiction de voyager commises par l’ancien Président, François Bozizé, qui, a-t-il découvert, utilisait un passeport diplomatique sud-soudanais au nom de Samuel Peter Mudde.
Ont Signé les Experts dont les noms suivent : Romain Esmenjaud, Mélanie De Groof, Paul-Simon Handy, Ilyas Oussedik et Enrica Picco